Les Bourses du travail (vision onirique)

Un autre regard sur : Les bourses du travail

Podcast

Épisode 2 du podcast du NPA 76

Pendant des dizaines d’années au début du 20ème siècle, les bourses du travail ont été bien plus que le lieu des sièges des syndicats : elles organisaient des services utiles à la population ouvrière, une contre société, essentielles à la structuration du syndicalisme, de l’action politique. Des pistes pour le syndicalisme de demain ?

Un autre regard sur les bourses du travail : transcription du podcast.

Aujourd’hui les bourses du travail accueillent les sièges des organisations syndicales dans un lieu commun. Elles ont été bien plus que cela au moment de leur création au tournant du 20ème siècle.

Dans les décades qui suivent la création en 1887 de la première bourse à Paris, plus de 150 apparaissent en France. Elles sont financées par les mairies, souvent après bien des débats entre la droite et les républicains dits de gauche parfois alliés aux socialistes, et bien sûr par les cotisations des adhérents, sachant que les syndicats qui s’y installent veulent être totalement autonomes pour la gestion des locaux.

Chaque bourse du travail décide de son fonctionnement, il est donc très variable d’une ville à l’autre et d’une période à l’autre. Leur caractéristique commune est d’avoir de multiples fonctions, bien au-delà de celles des syndicats actuels : elles développent des services utiles à la population ouvrière, organisent un monde parallèle, une contre société, une école d’émancipation dans un état d’esprit non mercantile, qui valorise les échanges.


Souvent le point de départ est le service de placement gratuit : celles et ceux qui cherchent un emploi y prennent connaissance des entreprises et secteurs qui embauchent. Est souvent associé à ce placement un service de secours de voyage pour faciliter la recherche de travail, le viaticum. Parfois existe aussi un « secours de subsistance » en cas de chômage.

Tout aussi importantes sont les activités d’enseignement, de formation professionnelle et culturelle.

Pour les animateurs des bourses du travail, l’instruction est mère de l’émancipation, il faut apprendre, se former pour gagner en liberté, d’autant que la lutte est également du ressort des idées : il faut convaincre pour gagner. La culture, c’est donc l’appropriation de la liberté.

Il existe :

  • des cours professionnels, en dehors de ce qu’ils appellent les méthodes de classe de l’enseignement bourgeois, qui donnent des qualifications,
  • des cours d’enseignement général, des bibliothèques, des conférences, des expositions,
  • et même des essais de réalisation de statistiques économiques.

Parfois existent des dispensaires médicaux qui offrent des diagnostics et des soins de meilleure qualité aux travailleurs et travailleuses touché·es par les accidents du travail.

Enfin dans ce cadre interprofessionnel, il s’agit d’unifier et de faire aboutir les revendications des syndicats ouvriers.

Les bourses organisent la résistance ouvrière, le soutien juridique devant les prud’hommes, les grèves, le soutien aux grévistes, l’accueil des assemblées générales, l’accueil des comités de grèves qui sont fréquents jusqu’aux années 1930, la popularisation, les collectes, les soupes « communistes » qui nourrissent les grévistes et l’exode des enfants (prise en charge par des familles adoptives le temps de la grève en cas de grève), et bien sûr la mobilisation contre les projets de loi réactionnaires .

L’objectif est de faire émerger une solidarité interprofessionnelle, dans certaines villes du midi agricole elles ont eu un tel rayonnement qu’elles organisaient les travailleurs agricoles.

L’administration des bourses du travail est assurée par des ouvriers manuels qui gèrent toutes ces questions, des personnalités avides de savoir, n’épargnant aucun effort ni sacrifices pour la défense de leurs idées.

Elles ont donc été à la fois le creuset du syndicalisme français et même d’un pan entier du socialisme du début du 20ème siècle.

et à la fois un lieu de structuration de la classe des exploité·es dans la société, pas seulement l’ouvrier·e en face de son patron, en créant des relations entre celles et ceux d’un même lieu, quelle que soit leur profession …

Tout·e jeune pouvait y acquérir en toute indépendance de l’état une formation professionnelle, une éducation artistique, le goût de la lecture, de l’étude, tout en participant à la solidarité aux luttes ouvrières.

Elles ont eu une pleine existence jusqu’à la première guerre mondiale, vont perdre leur centralité dans l’entre deux guerres, pour de multiples raisons. Mais cette expérience d’une grande richesse…ne doit pas être oubliée aujourd’hui.