Grève de mineurs, vision artistique.

Un autre regard sur la grève des mineurs de 1963

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Elle se produit à un moment charnière des mines dans l’économie et la société française.

A la fin de la seconde guerre mondiale, le charbon représente près de 90 % de la consommation énergétique hors carburants, et les mineurs, héros de la résistance, sont les acteurs du redressement économique. Les mines sont nationalisées, et le Statut est instauré qui prévoit entre 4 et 5 semaines de congés payés, assure au mineur pour la vie le logement, le chauffage , la sécurité sociale minière, et des dizaines de milliers d’embauches sont effectuées.

La puissance des mineurs et de la CGT, va être attaquée dès 1948 par les décrets qui renvoient au régime social d’avant guerre, et la répression violente de la grève de riposte par le socialiste Jules Moch qui envoie 60 000 policiers pendant 56 jours a un bilan terrible 6 morts, 3 000 condamnations et 6000 licenciements.

C’est à ce moment que le lent déclin des mines commence.

La mécanisation des puits permet une augmentation du rendement : la production atteint son apogée, autour de 59 millions de tonnes par an, en 1959-1960, alors qu’est décidée la diminution de la place du charbon.

Deux raisons pour cela : le choix politique et économique de recourir au pétrole en remplacement du charbon produit en Europe, et la volonté du pouvoir de de Gaulle de pousser encore son projet de réorganisation de l’appareil industriel, qui nécessite de défaire les salarié·es. Cinq ans après le coup d’État de 1958, il s’estime indestructible, il a gagné quatre référendums de suite avec des scores entre 62 à 90 % et obtenu une majorité absolue au parlement lors des législatives de novembre 1962.

Dans les mines les conditions de travail s’aggravent, mais ce qui concentre la colère est le niveau de salaire inférieur de 11 % à celui des autres secteurs. Les négociations ne donnant rien, la CGT appelle à une grève totale les 1er et 2 mars suivie d’une grève du rendement pendant 15 jours. FO et CFTC, alors en pleine évolution vers la CFDT, décident une grève illimitée à partir du 1er mars.

De Gaulle décide de réquisitionner les grévistes des cokeries, indispensables pour le fonctionnement des hauts fourneaux et de la fonderie, puis, voyant la réussite de la grève du 1er mars, totale dans les houillères du Nord Pas-de-Calais et en Lorraine, la réquisition de tous les mineurs. La quasi totalité des 230 000 agent·es des charbonnages (dont 2/3 travaillent au fond) refusent la réquisition, défient de Gaulle.

La réquisition voulait jeter la panique et semer la division. Elle a l’effet inverse, décuple la combativité, soude le mouvement, solidifie l’unité syndicale. La solidarité de la population avec les mineurs est énorme et constitue le deuxième mur contre lequel le gouvernement va se heurter.

Des manifestations associent la population aux mineurs. Une grève CGT-CFDT-FEN-UNEF de 15mn contre l’atteinte au droit de grève est massivement suivie.

Des collectes sont organisées dans tout le pays, à l’étranger, les artistes s’y mettent, d’immenses quantités de vivres sont envoyées, 23 000 enfants sont accueillis pour les vacances de Pâques. Dès la fin du mois de mars, des sommes correspondant à plusieurs jours de salaires sont versées.

Alors que les négociations entre les mineurs et la direction piétinent, la quatrième semaine de Congés payés est obtenue dans le textile et la métallurgie de la région parisienne : la grève des mineurs a modifié le rapport de force.

Après 38 jours, l’accord signé prévoit une augmentation des salaires sur un an, puis la quatrième semaine de congés.

Ce n’est pas la victoire totale, mais le pouvoir gaulliste est ébranlé.

Les travailleurs sortent plus forts du premier affrontement social depuis 1958.

En 1965, de Gaulle ne sera pas élu au premier tour de la présidentielle, mis en ballottage par Mitterrand soutenu par le PCF, le 10 janvier 1966 un accord d’unité syndicale CGT CFDT est signé … 1968 n’est pas loin !