Vision artistique d'un affrontement entre la gauche et les milices fascistes

Un autre regard sur : les prémices du Front populaire

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La mémoire du Front Populaire, de la grève générale de 1936 est vivante.

On se souvient moins des deux années qui l’ont précédé au cours desquelles on est passé d’une profonde division des organisations ouvrières, à cette unité.

En effet, lorsque les ligues fascistes et les organisations d’extrême droite attaquent l’assemblée nationale le 6 février 1934, et, à la suite d’une nuit de combats, poussent à la démission le gouvernement, les organisations ouvrières, politiques et syndicales, divisées, sont frappées d’impuissance. Si la division entre les fascistes et l’extrême droite empêche leur victoire complète, dans les mois qui suivent elles poursuivent leurs violences anti-ouvrières, leurs agressions physiques.

Après Mussolini en Italie, l’arrivée d’Hitler au pouvoir date d’un an. L’inquiétude grandit, avec le rattachement de la Sarre à l’Allemagne en 35, l’entrée des troupes allemandes en Rhénanie en mars 36.

Tous ces chocs vont imposer en deux ans l’unité sous de multiples formes.

La première réaction vient du parti communiste et de la CGTU le 9 février 34, qui manifestent en ayant au milieu des mots d’ordre antifascistes celui de « A bas l’union nationale réactionnaire et fasciste préparée par le parti radical et le parti socialiste ».

Le 12 février, la CGT appelle a la grève générale, rejointe par la CGTU. Plus de 4 millions de grévistes et un million de manifestant·es en France ! Le soir, les communistes rejoignent la manifestation organisée par le parti socialiste,aux cris Unité, Unité.

A partir de ce moment, les initiatives unitaires vont prendre de multiples formes.

Fin mars 34, est lancé par le Comité de vigilance des intellectuels antifascistes un Manifeste qui recueille immédiatement des milliers de signatures.

En juin 34 les communistes relaient en France la nouvelle politique de Staline, qui, inquiet de l’arrivée au pouvoir d’Hitler, cherche des alliés en Europe et inaugure une politique d’ouverture, ils proposent aux socialistes un pacte d’unité d’action, qui sera signé en juillet.

Allant plus loin que l’unité des partis ouvriers, le Parti Communiste, tout en affirmant continuer à lutter pour le pouvoir des soviets, prône contre le fascisme l’alliance avec les classes moyennes, c‘est à dire le parti radical, le parti de la petite bourgeoisie républicaine au centre de toutes les combinaisons parlementaires.

Au niveau syndical, en 1934 la CGTU propose la fusion à la base, la CGT veut un congrès d’unification. L’accord se fera en 1935, le congrès de fusion se tiendra en mars 1936.

Lors des élections cantonales d’octobre 1934 et municipales de mai 1935 le glissement à gauche favorise principalement le PC alors que le parti radical est en recul.

En Juin 1935, plus de 50 organisations, LDH, comités contre le fascisme, partis de gauche, syndicats,francs-maçons, travailleurs chrétiens, anciens combattants, associations sportives et culturelles, etc… décident de préparer ensemble une grande manifestation au 14 juillet 1935. C’est un raz de marée, après un meeting au stade Buffalo à Paris ou les assistants prêtent serment de « rester unis pour la défense des libertés démocratiques », 500 000 manifestant·es défilent dans Paris, et partout en France des rassemblements se tiennent, qui soulèvent le même enthousiasme.

A l’issue de cette journée, leur action continue comme Comité national de Rassemblement Populaire, chargé de rédiger un programme électoral. La LDH, les organisations antifascistes, les syndicats et les partis qui constitueront la majorité parlementaire publient en janvier 1936 le programme du futur Front Populaire. On est passé du front unique des organisations ouvrières et démocratiques à une alliance des organisations ouvrières avec la bourgeoisie radicale, dont les défauts apparaîtront ensuite.

Mais on voit comment les mobilisations populaires unitaires en réaction à l’émeute fasciste de février 1934, ont profondément modifié les organisations, le rapport de force et la confiance pour se battre, ce qui fera la force de la grève générale.