vision cubiste des barricades

Un autre regard : Les barricades de Parme en 1922

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En 1922, les chemises noires fascistes, financées par les grands propriétaires terriens, les industriels et les banquiers, armés par l’armée multiplient les expéditions punitives. Des centaines, voire des milliers de fascistes concentrent leurs forces sur une localité, saccagent les locaux des partis et des syndicats ouvriers, des ligues paysannes, des journaux de gauche, incendient les bourses du travail, les maisons du peuple, les coopératives, poussent à la démission les élus socialistes, passent à tabac ou assassinent les militants.

Face à cette violence, dans les zones ouvrières des équipes de défense, qui s’appuient sur les anciens combattants, leur barrent militairement la route. Mais sans coordination d’une ville à l’autre, le Parti socialiste et le syndicat CGL refusant d’organiser une riposte générale. Lorsqu’apparaissent les Arditi del Popolo ( les soldats du peuple), association d’anciens combattants issus des milieux populaires et socialistes, pour organiser le combat les armes à la main, ils ont désavoués par les partis de gauche.

En juillet 1922, sous la pression des bourses du travail anarchiste et socialiste de Rome, l’Alliance du travail, qui regroupait les syndicats ouvriers les plus importants, dont la CGL, appelle à une grève générale pour défendre les libertés politiques et syndicales. C’est une grève pour la défense de la légalité par l’État lui-même, celui qui protège les exactions fascistes, voire même les accompagne, arrête des défenseurs ouvriers. Malgré cela, elle n’est pas soutenue par le syndicat chrétien.

Sous la pression du gouvernement, l’Alliance du travail arrête la grève au bout de trois jours. Les chemises noires redoublent les attaques, le port et la ville de Gênes sont conquis par les fascistes, qui attaquent Milan et Parme.

Parme est une des seules villes dans laquelle, malgré les véto socialistes et communistes, existe une organisation sérieuse des Arditi del Popolo, qui sont structuré·es et entraîné·es. Ils se sont alliés à la légion prolétarienne et, depuis plus d’un an, les équipes d’autodéfense paramilitaire unitaires sont à l’œuvre, accueillant les prolétaires, hommes et femmes, syndicalistes et militants, des socialistes aux anarchistes. Toute la population participe activement aux combats, les oppositions politiques sont mises de côté.

Dix mille chemises noires attaquent Parme, bientôt renforcés face à la résistance.

Les combats font rage, les fascistes dévastent le centre de la ville, moins défendu, le cercle des cheminots, le siège du journal Il Piccolo, et d’autres locaux.

Le pouvoir passe sous le commandement des Arditi del Popolo qui sont décidés à résister jusqu’au bout. La population aide à dépaver les rues, creuser des tranchées, dresser des barricades : les quartiers populaires deviennent un camp retranché.

Face à cette résistance qui tue au moins quarante fascistes, contre cinq parmi les Arditi del Popolo, les chemises noires doivent quitter la ville : Parme la prolétaire a résisté et a sauvé en grande partie la ville de la dévastation.

Pourquoi ce qui a réussi à Parme n’était pas possible dans toute l’Italie ?

A ce moment, si la classe ouvrière est affaiblie, le parti fasciste a des résultats électoraux bien inférieurs aux socialistes, et face aux centaines de milliers de fascistes, peut-être un million, le mouvement ouvrier représente toujours une force importante, la CGL regroupe 2 320 000 syndiqués, la Confédération syndicale catholique près d’un million, le Parti socialiste italien plus de 200 000 adhérents, le mouvement coopératif socialiste compte 25 000 coopératives de consommation, de production et de crédit. La très grande majorité de la population et de la classe ouvrière est profondément hostile au fascisme.

Malheureusement, l’incapacité de mettre en place une riposte unitaire, d’organiser des formations de défense antifascistes du type des Arditi del Popolo donnera à Mussolini la possibilité de prendre le pouvoir quelques mois plus tard.

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